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Exposés Art Nouveau
29 avril 2008

Banque du crédit lyonnais

Le crédit lyonnais à Nancy
7 bis rue saint Georges


Historique : l'édification de la succursale du crédit lyonnais

La commande

 
    En 1901 , Mme la veuve Gardeil , propriétaire de l'emplacement , décide de louer durant vingt-quatre ans les locaux à la société privée du crédit lyonnais . Le président de celui-ci veut alors adapter l'hôtel particulier à la fonction de banque . En fait , le crédit lyonnais avait déjà une succursale sur Nancy mais elle était trop petite . C’est pour cela qu’il a décidé de louer cet édifice .  L'établissement va très vite connaître un succès et cela se voit de par sa pérennité .

     Le crédit lyonnais a pour président Henri Germain (1824-1905) , un innovateur . En effet , il a écrit en 1882 des règles de gestion commune à l'ensemble du secteur bancaire français, fixant l'allocation de l'épargne collectée pour des projets industriels et des prêts à long terme. Celles-ci sont appliquées jusqu'en 1966-1967 , lorsque le tarissement des sources de financement des entreprises françaises et des problèmes financiers au sein des ménages se fait ressentir lourdement .
    Outre cela , Henri Germain a fait une brillante carrière bancaire . Il devient en 1863 président fondateur de la banque du Crédit Lyonnais , puis en 1865 , le président fondateur de la Société foncière lyonnaise , une société immobilière . 
    A côté de cela , il a fait un peu de politique . Ainsi , il a été président du Conseil Général de l’Ain (1871-1883) et député de l’Ain (1869-1893) .
    Enfin , il est un personnage historique important à Cannes de par la fondation du boulevard Cimiez qui a fait faire fortune à tout un quartier en 1892 . Il est aussi membre de l’Académie des sciences morales et politiques . Celle-ci traite du comportement d’un homme dans le cadre de la société afin de trouver le meilleur gouvernement possible .  Henri Germain est donc un politicien , un banquier et un intellectuel .

Le contexte 

    Autour de 1900 , Nancy est la ville de diffusion en France du mouvement mondialement connu de l’Art Nouveau avec notamment la création en 1901 de l’industrie d’art appelée l’Ecole de Nancy . Les chefs de file sont Emile Gallé , Antonin Daum , Louis Majorelle , Victor Prouvé et Eugène Vallin .Ce mouvement a pour but de faire rayonner la ville de par sa maîtrise des industries et son artisanat d'art c'est-à-dire le cristal , le bois , le verre , le bronze , la faïence , la céramique et (...) l'aciérie . Il entame son enracinement dès 1894 avec une brillante exposition à la Société des Arts décoratifs. Le terme d’école est attesté en 1896 dans des textes signés par Emile Gallé. Instigateur du projet, Gallé propose un retour à la nature comme unique source de motifs artistiques. Le succès considérable rencontré lors de l’exposition de 1900 à Paris rend alors nécessaire la formation d’un groupe officiel. A côté de cela , l’économie de Nancy est fleurissante , c’est pourquoi le crédit lyonnais , puissante banque mondiale , peut se permettre de faire une succursale digne de ce nom . D’ailleurs , dans le cadre des implantations de succursales par le crédit lyonnais Nancy n’est pas un cas isolé puisque entre 1900 et 1914 , la banque a doublé son nombre de succursales .

La construction de ce site

    Elle est confiée à l'architecte Félicien César (1849-1930) . Ingénieur d’origine belge , il est arrivé en 1875 à Nancy et a été naturaliser français en 1887 . Il est spécialisé en construction et installation d’usines ce que rappelle la structure métallique de l’édifice . Lors de ce chantier , il rencontre d’importantes contraintes  spatiales , fonctionnelles et patriotiques . Pour expliquer ce dernier point , il faut rappeler que le directeur de la banque n’a souhaité avoir que des ouvriers nancéiens .

    Charles Gauvillé a exécuté la verrière d’après les plans fournis par Jacques Gruber . Il est un peintre-verrier débutant avec un petit atelier de verrerie à Malzéville . Gauvillé et Gruber collabore fréquemment ensemble jusqu’à ce que Gruber ai son propre atelier .

    L'entrepreneur France Lanord et Bichaton réalise le gros oeuvre notamment le plancher et les linteaux.

    L'édification de cette succursale a lieu en 1901 - 1902 . L'édifice est relié par une entrée piétonne à la rue saint Georges ,coeur de Nancy et donc lieu très fréquenté .  Il est à noter qu'une grande partie des façades des commerces de Nancy sont rénovés durant cette période par une série d'artiste de Nancy comme les frêres André , Eugène Vallin , Henry Sauvage ou encore Henry Gutton .

L’histoire de l’oeuvre après son édification

1902 - 1926 : dès sa construction l’édifice est loué au crédit lyonnais et ce durant 24 ans par Madame la veuve Gardeil .
1920 : la verrière est restaurée par Gruber
1929 : Des travaux d'agrandissement sont confiés à André César , architecte et fils de l’ingénieur Félicien César . André a participé au premier chantier donc il a suivi la volonté des protagonistes ayant conçus la succursale .
1973 : l'édifice est réaménagé par Roger Lauraise et Philippe Royer .
1980-1981 : la verrière est remise en état par Atelier 54 de St Nicolas-de-port , suite à une menace de destruction .
1996 : la succursale est inscrite partielle aux monuments historiques de France .
Jusqu’à aujourd’hui , l’édifice est toujours utilisé dans sa fonction d’origine .

Description

La situation 

    L'édifice se trouve le long de la rue saint Georges menant à tous les lieux important du coeur de la ville tels que le marché et les grands magasins vauxellaire (de la même époque) . Il faut donc replacer cette succursale entre toute une série de boutiques .

La composition d’ensemble 

Le crédit lyonnais offre une proximité aux clients dès le pas de la porte . Il y a deux bâtiments collés l'un à l'autre . Chacun a un rez-de-chaussée deux étages et des combles . Un est en façade . C’est celui auquel a accès le public et un autre derrière est réservé au personnel . Le premier bâtiment s'organise autour d'un immense hall et le deuxième autour d'une cour . Côté rue , il y a une façade de style classique assez banale qui ne laisse pas présager de la magnificence de la verrière du hall .

Les matériaux

Gros oeuvre :
- Pierre de taille pour la façade
- Moyen appareil pour les murs
- Bois pour les meubles à l'intérieur
Calcaire et fonte

Oeuvre secondaire :
- Sculptures par exemple en façade les lions 
- Verre pour les vitraux de la verrière de 264 panneaux  et pour le sol de la salle des coffres
- Zinc pour la couverture du toit à certains endroits

La structure

    La banque est unique de par sa verrière dans la grand hall maintenue par une charpente en acier . Celle est surmontée d’une trame métallique qui la protége . La charpente métallique  porte un plafond concave. Mais , pour éviter les problèmes de dilatation , les pièces principales de la charpente sont en bois . De plus , pour réduire l’effet de serre de l’espace vitré que forme le toit et la verrière , il y avait une bâche . De plus , dans ces combles , on peut remarquer une étroite galerie permettant l’entretien . De part et d’autres de la verrière , il y avait une couverture de zinc et sur le côté rue la toit était en pente et en ardoise : traditionnel . Cela permet de rajouter de la magie à cet endroit puisque le client ne voit pas depuis la rue une différence avec les autres façades , par contre l’intérieur fait toute la différence .

L'élévation

    La façade est complètement en pierre de taille . Elle est de style classique un peu chargé. Elle s’inspire de son homologue parisien bâti en 1878 . Il est à noter qu’au départ elle ne comprenait que deux travées soit le centre et la gauche , donc nous délaisseront dans le commentaire la troisième soit celle de droite . La travée principale se compose d’une haute et large baie cintrée donnant sur le rez-de-chaussée mais aussi sur le premier étage. La baie vitrée donne sur la salle des dépêches . Mais elle sert aussi à éclairer les bureaux du premier . Au deuxième étage , il y a une fenêtre surmontée d’un fronton dans lequel il y a une fenêtre sous forme de couronnement . Le tout est surmonté d’une toiture en pente de 25m de haut .
    La seconde travée , soit à gauche , est bien plus simple . De plus contrairement à la principale , elle n’est pas en avant-corps . Elle est composée d’une baie donnant sur le cabinet du directeur au rez de chaussé puis d’une fenêtre géminée surmontée d’une fenêtre simple . Toutes les deux donnent sur des bureaux . Tout en haut , il y a une balustrade en marbre dont on aperçoit aussi une lucarne. Il est remarquable de voir la date de 1901 et la signature faite par Félicien César sur la façade principale .

La couverture 

     Le toit en pavillon est composé d’ardoises , de zinc et de verre . L'ardoise est couramment utilisée , par contre le verre est lié à la verrière du hall . En effet , selon toute logique si il y avait eu un toit en ardoises , il n'y aurait eu aucun puit de lumière dans le hall permettant un éclairage mettant en valeur la verrière d'où la présence du verre .

La distribution interne

! attention le plan dont nous nous servons date de 1974 mais sur la photo de 1902 il est visible que la partie du garage donc la partie de droite n'était pas là !

Le plan est rectangulaire avec une légère irrégularité dû à l'adaptation au lieu . La succursale mesure 45 m de profondeur sur seulement 12 m de large .

    Tout d'abord le bâtiment principal soit celui donnant sur la rue auquel le public peut accéder :
Lorsque nous entrons il y a une salle des dépêches puis un petit SAS ensuite nous arrivons sur le fameux hall surmonté par la superbe verrière de Gruber . Il y avait 17 guichets où les clients s'adressaient .Cet espace couvrait plus de la moitié de la surface disponible au sol , selon la volonté du président du crédit lyonnais . De ce hall de 30 m de long , il y a un accès en entrant à gauche vers le bureau du directeur (donnant sur la rue) , deux escaliers pour descendre au sous sol , un troisième bien plus grand permettant de remonter du sous sol ( au milieu du hall à droite) . Tout au fond , on voit le fameux bâtiment arrière composé d'un escalier vers le premier étage et un accès réservé au personnel : sanitaires et vestiaires .

    Il faut s'arrêter un instant sur la verrière . En levant les yeux le décor floral est abondant avec plafond orné d’une verrière pourvue d’un léger décor de clématites avec médaillon monogramme CL (crédit lyonnais) au centre . Les couleurs dominantes sont le violet , le turquoise et le parme clair . Au départ , Gauvillé avait ajouté la date 1901 mais lors de la restauration de 1920 , Gruber l’a supprimé . Le verre de cet ensemble en doubles couches est transparent . Il est gravé à l’acide . Il y a de l’émail sur le verre ainsi que du plomb . (21.36 * 8.32 m soit 250m2 ) Cette verrière permet un excellent éclairage d’ailleurs autrefois le dallage comportait un parquet vitrifié d’où un sous sol directement éclairé . La verrière est surmontée par un comble vitré . L’auteur de cette verrière est Gruber, né en 1870 à Sundhouse en Alsace. Il commence par étudié à l’école des beaux arts de Nancy, puis la ville lui accorde une bourse pour aller finir ses études à Paris. Il passe d’abord pour un atelier privé, puis par l’école des arts décoratif puis enfin par les beaux arts. Quand il revient en 1893, il devient enseignant à l’école des beaux arts. Il réalise quelques décoration ou meubles pour des architectes tel que Majorelle. En 1897 , il monte son propre atelier , mais  jusqu’en 1904, il fait appelle à Charles Gauvillé.Comme pour ce cas précis où Gruber a fait les cartons et Gauvillé a réalisé . Gruber laisse sa touche personnelle dans ses créations en incérant des verres gravés dans son mobilier. Dès 1900, il privilégie le travail du vitrail et est associé à beaucoup de grand chantier tel que la chambre de commerce, la brasserie Exelcior, et bien sur ici même le crédit lyonnais. En 1901 , il est l’un des fondateurs de l’école de Nancy. Aujourd’hui encore, il est considéré comme le maître verrier le plus prolifique à Nancy.


    Lors d'agrandissement  une partie vient s'ajouter à droite . Il y a des garages directement accessible depuis la rue . Derrière les garages , il y a le dépôt d'archives ainsi que les différentes commodités telle la citerne de fuel , le dépôt de carburant et le groupe d'électrogènes pour la lumière et le chauffage . Tout au fond il y a un grand secrétariat autant accessible par cette partie que par l'autre .

    Au sous sol accessible par le hall , il y avait la salle des coffres et l'économat (dépôts de titres ...).

    Dans le hall , entre les sanitaires , il y avait donc un escalier qui permettait l'accès au premier étage . Là , il y avait des bureaux et le service de porte feuilles (actions) . Cependant , ceci ne se situait qu'aux extrémités puisque au centre il y avait juste des couloirs et une vue sur le hall . Cela permettait à la lumière de circuler entre la verrière juste au dessus et le client au rez de chaussé : un puit de lumière . Comme vous pouvez le remarquer , il y avait effectivement deux bâtiments mais ceux ci étaient très liés de façon à améliorer la circulation au sein du bâtiment .

    Au deuxième étage , la disposition était très différente . En effet au centre de cet étage la verrière de par sa présence bloquait une grande partie de l'espace . Sur l'arrière de l'édifice , il y avait une salle de conférence . Tant dis que sur l'avant , donnant donc sur la rue , il y avait un cabinet médical et les archives .

    Par dessus , on voit donc les combles couvertes par la partie du toit en ardoise . Puis au dessus de la verrière un chassis vitré permettant une mise en valeur de la verrière en bas : puit de lumière . Enfin à certains endroits plats sans verrière il y a une couverture en zinc .

Notes de synthèse

     La succursale du crédit lyonnais à Nancy est le seul et unique exemple en Europe d'une verrière de cette taille toujours présente dans son espace originel . Lors de sa construction tous les journaux s'y sont intéressés. Cet édifice étonne beaucoup de par la sobriété de sa façade laissant apparaître un véritable chef d'oeuvre  de la verrerie en son sein .

    L’article du 20 avril 1902 dans “L’Immeuble et la Construction dans l’Est” par Emile Jacquemin

“ La part , qui est énorme , de Mr Jacques Gruber a été de concevoir la douceur de la lumière , la richesse du dessin , l’harmonie délicate d’une tonalité de rose . Suivant son tempérament déjà si connu, Mr Gruber a stylisé les fleurs par des moyens et des développements qui paraissaient tout simples et naturels, car le jeu des tiges et des feuilles est un sentiment absolument personnel. Ici , c’est la modeste clématite qui grimpe , s’enroule et pend le long d’un treillis , se contournant lui même en cadres pour chaque travée , dans les voussures d’un berceau aérien de plein air rosé : c’est un tout , mais un tout unifié dans une harmonie générale , diversifié dans des caprices étonnants , accentué dans des angles d’où s’épanouissent des tiges de supports tantôt fortes , tantôt tenues , mais toujours élancées . “

    La succursale a été entièrement réalisé dans un but fonctionnel . Cependant , elle n'oublie pas la décoration dont l'édifice se concentre à la mettre en valeur . Celle-ci est une originale dans sa grandeur mais pas par son existence puisque Félicien César a pu voir l'art nouveau se développer à Nancy après son arrivée en 1875 . Il est à souligner que cet édifice est le premier immeuble de l'architecte . Nancy , fer de lance de l'Art Nouveau en France , a vu se développer un style se fondant sur les décors animaliers et végétaux , ornant le verre , la ferronerie , l'acier et le bois . Ce style se voit autant en architecture que dans le mobilier . Au delà de cela , ce bâtiment est un regroupement des meilleurs entrepreneurs de Nancy . Cela montre le patriotisme des lorrains de l'époque .


Sources 

- Wikipedia
- Patrimoine-de-france.org
- des articles du journal " L'immeuble et la construction dans l'Est"
- "Nancy , Architecture 1900" de Mr Francis Roussel

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