LA
MAISON DU PEUPLE
La Maison du peuple est intimement liée à l’histoire du parti socialiste Belge, en effet :
- Au carrefour de 3 civilisations, le socialisme belge
partage les caractères essentiels de chacune d’elles. Le parti ouvrier Belge suit
une orientation réformiste ; il refuse la révolution car il estime que la
conquête du pouvoir sera obtenue par une classe ouvrière organisée, à la suite
d’une évolution progressive vers la victoire finale.
- Le suffrage universel, récemment conquis, offrait aux
socialistes la perspective de s’assurer le contrôle du pouvoir. Le succès des
grèves des années 1880 et l’entrée des socialistes au Parlement après les
élections de 1894 consacraient la montée rapide d’un mouvement qui comptait
seulement 9 années d’existence. Ce sont les années glorieuses du Parti Ouvrier
Belge.
- Dans tous les coins du pays naissent des ligues
ouvrières et on assiste à un développement des coopératives. Fondées et gérées
par les coopératives, les maisons du Peuple apparaissent : construites
dans chaque ville importante de Belgique, elles n’étaient pas seulement des
locaux ou les différentes organisations ouvrières tenaient des assemblées et
installaient leurs services administratifs ; elles étaient en même temps,
l’instrument et le symbole de la solidarité morale et matérielle qui soudait
étroitement toutes les formes de l’organisation du prolétariat en vue d’une
action commune. Elles représentaient l’organisation locale du parti, comparable
à ce qu’est l’hôtel de ville pour les communes urbaines.
- Leur rôle ? Chaque fois qu’une grève était
imminente, les ouvriers se rendaient à la maison du peuplemaison du peuple de Bruxelles.
En 1886, Bruxelles à son premier siège situé rue de Bavière, dans une ancienne
synagogue pour
rencontrer les militants responsables et discuter avec eux. On comprend des
lors l’importance et la nouveauté de la (P2), qui
comprenait, en plus d’un café, de grandes et petites salles, pour les
groupements ouvriers. De plus le bâtiment est beaucoup plus
« classique » que la Maison du Peuple.
- En 1888 une société y est constituée, elle produisait
500 000 pains. 4ans plus tard, elle atteindra le chiffre de 4
millions ! Une boucherie et un service médical et pharmaceutique sont
bientôt créés. En 1892, la société prend définitivement le nom de « maison
du peuple », société coopérative ouvrière de Bruxelles. La vieille
synagogue de la rue de Bavière ne suffit plus : il faut un véritable
centre social. Au lendemain du succès électoral qui donne au Parti ouvrier Belge
plus de 300 000 voix et 28 députés au Parlement, la décision est prise de
construire un nouvel édifice et Horta écrit dans ses
mémoire : « Unanimement les anciens ouvriers, et les nouveaux
intellectuels se rencontrèrent en mon nom. J’éprouvais une belle émotion le jour
ou une députation de trois délégués vint me demander de prendre la charge des
plans … j’avais les épaules assez chargées mais, on était jeune, on se
chargerait bien encore de ceci. D’ailleurs, l’œuvre était intéressante, comme
je l’entrevis instantanément : Construire un palais, qui ne serait pas un
palais mais une « maison », ou l’air et la lumière seraient le luxe
si longtemps exclu des taudis ouvriers : une maison ou serait la place de
l’administration, des bureaux de coopératives, des bureaux de réunions
politiques et professionnelles ; d’un café ou le prix des consommations
serait en rapport avec les aspirations des dirigeants combattant l’alcoolisme
encore si invétéré dans le peuple ; des salles de conférences destinées à
élargir l’instruction, et, couronnant le tout, une immense salle de réunion
pour la politique et les congrès du parti, ainsi que pour les distractions
musicales, et, plus tard, théâtrales des membres. Ah ! Le beau programme ! »
I – L’HISTORIQUE
1) La construction
- Au mois de mai 1985, le conseil d’administration de la
coopérative socialiste acquiert pour 228 000 francs un terrain de 13ares
qui donnait, de face, sur la rue Stevens et latéralement sur la rue des Pigeons
et la rue de la Samaritaine. Un petit terrain donc que Horta décrit comme
« irrégulier en diable, et frappé de la servitude réglementaire de
hauteur, et de la surface de non bâtie, a laquelle le service des travaux ne
faisait ni exception, ni concession … encore bien moins dans le cas présent ou
il s’agissait d’un corps politique ne régnant pas encore en odeur de sainteté,
loin de la ».
- Horta se met immédiatement à l’œuvre. Il passe 6mois
dans les plans préparatoires et 3 mois pour les mettre à l’échelle. Une 15zaine
de dessinateurs, sous la surveillance de l’architecte Pringers, travaillent
durant 1 an et demi à la reproduction des plans grandeur d’exécution. Tout est
dessiné avec minutie d’après la réalité, des particularités de la façade
jusqu’au moindre détail de l’intérieur. Le jour de l’inauguration, on apprend
que la conception de l’édifice a requis 75 rouleaux de
75 mètres
de papier d’un mètre
cinquante de haut soit environ 8500metres carrés de dessins ! Soit l’équivalent en surface
de la grande place de Bruxelles.
- Les travaux de terrassement commencèrent à la fin de
l’année 1985, avant l’élaboration définitive d’un projet d’ensemble. Le début
de la construction est lente car au cours du premier semestre 1896, la
construction est ralentit suite à des retards dans la fourniture des pierres
destinées aux plinthes et aux soubassements ; la rigueur de l’hiver
1986-1987 provoqua un nouvel arrêt et il a alors fallu attendre le printemps
pour continuer les travaux, qui, enfin, redémarrent de manière soutenue. Les
poutrelles en fer, réalisées par la maison Bertau, furent rapidement montées, à
la grande satisfaction de tous. Un nouveau contretemps vient perturber la
construction : craignant que la maison du peuple ne soit pas assez
grande, on acquiert 2 parcelles de plus prés de la place de la chapelle, et, au
lieu de poursuivre les travaux, on procède à des démolitions et on apporte des
variantes aux structures déjà réalisées jusqu'à une certaine hauteur, non sans
susciter des protestations pour les retards multiples. Entre temps, les projets
avaient été amendés, Horta complète alors les plans de la grande salle des
fêtes et, a partir de 1898, tout se déroule enfin selon les prévisions.
- La construction de la maison du peuple fournit
aussi l’occasion d’appliquer intégralement le système coopératif : la
société coopérative ouvrière était l’acquéreur et les travaux furent exécutés
par différents coopératives. Ainsi, l’atelier des menuisiers de Bruxelles
réalisa l’ameublement, donnant du travail à une 40aines d’ouvriers pendant 1an
et demi. La coopérative de L’union des peintres de Bruxelles exécuta les
peintures aussi et le Benkendorf pour les vitres et les verrières
- La construction a alors nécessité :
- 600 000 kilos de fer
- 2000m cube de maçonnerie.
-
250 mètres
cube de pierre blanche et
150
mètre cube
de pierre bleue.
- Le mètre carré de surface bâtie revenait a 500 francs
de l’époque (pas énorme quand on sait qu’une maison ordinaire coutait 300francs
et que le Palais de la Justice avait lui couté 2000francs !)
La Maison du Peuple
fut inaugurée le dimanche 2 avril 1899 en grande pompe (P3)! Pour cet
évènement un cortège s’était formé au niveau de la gare du Midi pour aller vers
la rue Joseph Stevens. Il y avait des Maisons du Peuple dans chaque grande
ville de la Belgique mais celle de la rue Stevens était la plus
importante.
C’est la construction de cet
immeuble comme chacun sait, qui devait asseoir pour toujours la
réputation du grand architecte belge Victor Horta.
Des centaines et des centaines de
drapeaux rouges étaient balancés durant cette marche. Tous étaient là
pour inaugurer l’église socialiste de Victor Horta. Emile Vandervelde, Jean Jaurès le
célèbre socialiste…et bien d’autres figures de l’époque.
« Pâques rouges intitulait
l’éditorial du « Peuple » dans une édition spéciale pour l’événement.
« C’est le jour solennel, c’est l’heure triomphante ! Voici le fruit
de nos efforts ! Regardez aujourd’hui la grande œuvre qu’enfante le Peuple
uni » Chantent des poètes. « L’œuvre superbe est terminée, œuvre
d’espoir et d’avenir »
II – LA MAISON DU
PEUPLE
1) L’architecture extérieure
-
Horta se retrouve face à deux difficultés dés le
début :
- CAR La façade en verre et en fer est à réaliser
sur terrain difficile. Et cette façade centrale doit être elliptique pour
épouser la forme de la place Vandervelde.
Pour la première fois en effet depuis certains monuments
gothiques, Horta crée un langage original qui distingue l’architecture belge et
la rend indépendante
Dans la maison du peuple, Horta dispose pour la première
fois non d’une façade étroite mais d’une bande de 80metres de long qui adhère
au périmètre extérieur du terrain, se courbe et se recourbe au centre et décrit
ainsi une ligne vaguement sinusoïdale. (P4).
Il reprend aussi
certains thèmes fondamentaux de la recherche baroque et atteint, dans la courbe
sinusoïdale de la maison du peuple, une certaine fluidité dans l’espace.
Depuis le sol jusqu’au sommet, on a une hauteur de 21mètres.
Au pied de la façade, on trouve le soubassement qui
était en petit granit (P5).
Les montants en fer, qui s’accrochaient au soubassement ou y
prenaient simplement appui (P6),
s’élançaient ensuite, dans une riche variation des thèmes dont toutes les possibilités
étaient exploitées
Autre élément important, il faut noter que la façade de la
maison du peuple suit la forme du terrain et la déclivité de la rue. Un
dénivelé qui atteint 7mètres !
Maintenant, les différentes façades :
Elles étaient surement d’une teinte rouge donnée par les
pilastres de briques de cette couleur et les ferronneries peintes en rouge. (P8)
La structure de pierre ne constitue que l’encadrement de la
façade, comme un cadre décoratif autour d’une peinture.
L’ensemble est bien « d’acier
et de verre » (P9);
le métal est développé dans des formes très naturalistes qui, à quelques
endroits, semblent naitre de la pierre comme des plantes. Le principe
traditionnel de n’utiliser la pierre que pour des structures portantes massives
est abandonné ici. L’acier, pour lequel on entrevoyait un grand avenir, porte
maintenant contre tout logique les plus grandes charges.
Prendre l’acier comme matériaux prédominant est un pari pour Horta et il en est conscient étant donné qu’il
l’écrit dans ses mémoires : « Ce matériaux n’était guère nouveau,
mais il était encore rarement employé sous une forme artistique, en raison de
l’hostilité qu’il rencontrait auprès du public, qui ne voyait que son usage
industriel, et ne l’envisageait nullement au point de vue artistique ».
Horta franchit alors le pas pour appliquer ce matériau
industriel à l’architecture, pour le faire accepter et faire en sorte qu’il
plaise a la fois aux clients du magasin (il ne fallait pas nuire à la réussite
commerciale de son client) et aux hôtes des riches hôtels de maitre.
Dans la mesure où le fer libérait l’espace intérieur et
permettait surtout à la façade de perdre toute consistance, il était vraiment
un symbole de la transparence et permettait d’inverser le rapport entre espaces
pleins et espaces vides pour laisser les surfaces transparentes dominer.
- Façade du coté de la Place Vandervelde
Elle a une forme elliptique pour épouser la forme de la
place.
ENSUITE, dans sa composition, on a 2 piliers (P10) qui s’élançaient
des cotés de l’entrée du café et ce jusqu'à la hauteur de la balustrade.
Tous ces piliers, que l’on retrouve sur toutes les façades,
sont en briques rouges de plusieurs teintes afin de composer un chromatisme
rougeoyant et chaud rappelant la couleur du parti.
On a 7 divisions au dessus de la porte (P11) et 2 de chaque
cotés du 1er étage, ces divisions sont rythmées par de fines nervures
qui s’appuyaient sur une console métallique d’amortissement.
Le balcon présent au 2ème étage s’interrompt à
hauteur de l’escalier visible (P12).
Ce balcon était légèrement bombé (P13).
Soutenu par de puissantes consoles en fer rivetées à la
charpente (P14) et
des petites voutes de briques qui se courbent pour renforcer l’ouvrage (P15) afin de soutenir la
pression de la salle des fêtes.
Le balcon se tient sur les nervures, avec un jeu de courbe du balcon face
aux nervures verticales. (P16)
Ces nervures
métalliques se poursuivent dans les linteaux des fenêtres du 3étage et
certaines sont poursuivent par les porte drapeaux qui filaient vers le ciel. (P17)
En termes de lignes, la cage d’escalier est décalée, et
c’est une courbe étrange qui assure l’harmonie des lignes. (P18)
La balustrade, construite suivant la technique habituelle
des fers plats (P19)
ne renonçait pas aux effets dynamiques provoqués par le doublement ou le
triplement de l’épaisseur du fer aux points de départ de la spirale pour se
terminer, en s’amincissant, par le rituel « coup de fouet ».
Confronté avec la nécessité de rendre l’exécution simple et accessible, Horta
ne renonce à rien de ce qui faisait partie désormais de son langage
spécifique ; il est amené, pour ainsi dire, à se réinventer lui-même, en
atteignant des résultats d’une grande concision. On retrouve des balcons de ce
genre à l’Hôtel Solvay,
Ces parties tôlées étant destiné à porter des inscriptions de
noms de personnalités socialistes (P20)
Même si l’étude de chaque élément semble démontrer que la
façade est plutôt hétérogène, le tout est quand même assez harmonieux. (P21)
-
La Façade surmontant l’angle d’entrée (à l’angle
de la rue des pigeons et de la place Vandervelde):
La porte percée dans des murs en pierre bleue était la plus
monumentale (P 22) de
l’édifice car elle donnant accès au local susceptible d’accueillir le plus de
monde. Avec cette porte on peut accéder au grand vestibule, qui amène vers deux
escaliers.
Le bow-window (fenêtres en saillis sur une façade) au dessus
de la porte (P23)
saillant brise la façade et lui est raccordé avec une virtuosité remarquable.
Il ne s’agit plus d’éléments interchangeables appliqués sur le mur, mais bien
de courbures de la paroi même.
Sur ce bow-window, deux balcons étaient en saillis (P 24).
Ce balcon est intéressant car il est quasi certain qu’il
n’avait pas été imposé dans le programme. Horta l’inscrit délibérément dans
cette partie d’angle.
- Façade coté rue des Pigeons : (P25)
Horta opte pour un parti pris plus simple, plus calme, plus
horizontal en abandonnant les nervures saillantes des linteaux des portes.
On retrouve un escalier avec les mêmes caractéristiques que
celui de la façade concave. Un escalier qui utilise la possibilité offerte par
le verre, c’est ainsi qu’on voit les escaliers depuis la rue.
- La rue de la Samaritaine (P 26)
Elle présentait des ouvertures dépouillées, taillées très
simplement et regroupées en séries de trois et de 5 éléments avec des
plates-bandes rectilignes de fer. (Dans
le carré rouge)
2)
L’aménagement intérieur
Cet édifice doit
symboliser la puissance du parti ouvrier montant. Il est situé près des
quartiers populaires et, de sa toiture-terrasse on aperçoit le bas de la ville.
L'agencement des pièces est conçu pour la facilité d'accès et la sécurité :
Au RDC, on a un espace très ouvert avec multiples entrées.
On retrouve une salle de café sur deux niveaux et des vitrines de magasins
Au 1er étage, On a la partie haute du café, la
salle de réunion au dessus de l’entrée d’angle, et des magasins.
Au 2eme, on a divers locaux.
Au 3eme, On a la salle de spectacle.
Au 4eme (toit), le toit où on retrouve la balustrade
On peut rappeler que l’aménagement intérieur offrait de
multiples associations de matériaux comme des combinaisons pierre-fer,
fonte-fer, bois-marbre, fer-verre ainsi que des alliances de bois de
différentes qualités et de couleurs contrastantes.
Le fer occupe aussi une place primordiale à l’intérieur car il est très présent
dans deux lieux : dans la salle de café et dans la grande salle de
spectacles comme nous le verrons dans l’étude de l’aménagement intérieur.
D’ailleurs cela permet à la lumière de pénétrer profondément
dans le bâtiment par la toiture vitrée et la façade de verre donnant sur la
rue
Plus précisément, on avait :
(DIAPO 1
- RDC)
Un café au RDC et on y
rentre par l’entrée principale coté place Vandervelde.
(P 27) Il est mis au RDC pour continuer l’habitude
contractée rue de Bavière et surtout parce qu’il devait faire office de hall
des manifestations et permettre donc à une foule compacte de s’y réunir sans
difficultés.
La salle de café est un octogone
irrégulier de 20mètres de long, 16mètres de large et 8mètres de haut qui occupe
la partie centrale du bâtiment. Il est légèrement dissymétrique à cause de la
façade concave. Dans la maison du peuple, l’irrégularité du terrain est
ordonnée par la recherche d’une série de polygones contigus dotés au moins d’un
axe de symétrie (MONTRER SUR
DIAPO). Horta organise presque toujours l’espace en structures
polygonales qui se touchent ou s’interpénètrent en vue de suggérer des lignes
directrices diagonales et de multiplier des tracés fluides.
Du coté droit, les poutrelles
jumelées prenaient appui sur des consoles en pierre blanche qui partaient du
soubassement (P 28).
C’était un des éléments les plus vigoureux dans la continuité entre la pierre
et le fer, thème sans cesse approfondi par Horta. A l’extrémité haute de ces
poutrelles, on avait deux nervures qui se croisaient (P29) pour plus de résistance mais tout en
restant esthétique.
Du coté gauche les nervures
métalliques descendaient directement vers les sous-sols (P30), sans soubassement.
Le plafond était réalisé selon un
dessin dominé par le jeu des diagonales.
L’analogie avec l’art gothique et
l’influence des plafonds en charpente décrits et illustrés par Violet le Duc
dans son dictionnaire sont ici évidents.
Le volume de la salle et la courbure
des poutres déterminaient l’importance et la force concave de la façade ou les
montants des cloisons vitrées étaient en rapport avec la division du plafond en
éléments carrés de 5metres de coté environ. La structure compliquée du plafond du
café, élaborés comme une voute d’arête plate devait soutenir toute la charge
des étages de toute l’élévation (P31).
Les plafonds étaient élaborés
rationnellement mais en même temps de façon décorative. La décoration étant fondue dans la construction.
Le café de la Maison du Peuple
était l’une de ces structures que Horta avait poussé jusqu'à l’extrême.
La finesse de la construction
métallique était accentuée par la lumière dont la pénétration était
soigneusement calculée.
Le porche d’entrée (Porte d’entrée
vers le grand vestibule, à l’angle de la place Vandervelde et de la rue des
Pigeons) (P 32)
Il était d’aspect austère.
Un caisson nervuré surplombe les
battants, placé en encorbellement, il soutient la façade. (P 33)
Une cloison vitrée munie d’une
double porte vitrée, sertie entre deux minces piliers rectangulaires, reliés
par le soubassement aux deux pilastres engagés dans les murs latéraux, le
séparait du grand vestibule.
Dans les portes on trouve des
éléments en fer coupés en forme de pétales, qui contrastent avec la robustesse
des matériaux. (P34)
Piliers et pilastres étaient surmontés de
chapiteaux et impostes originaux sculptés d’après des moulages, réalisés dans
les ateliers de Horta, et qui recevaient des poutrelles assemblées.
ð Sas Obscure juste après le porche, sombre
comme savait le faire Horta
ð Le grand vestibule (on y accède par l’entrée
précédente)
Il se présentait très ouvert et
de proportion assez grande.
Divisé longitudinalement en 3travées
correspondant à celles de la salle de café, il était séparé des autres locaux
par des menuiseries en chêne largement vitrées. L’échappée latérale de droite
permettait de voir la presque totalité de la grande salle de café (P35), tandis que celle
de gauche faisait découvrir un double escalier a révolution curviligne et
gracieux (P 36)
(C’était l’escalier utilisé pour descendre des étages).
On constate un contraste évident
entre les deux échappées disponibles.
Si l’on va vers les escaliers, avant
de monter les marches, il fallait passer sous un vaste portique en fer, une
baie a triple ouverture (P37),
d’esprit gothique qui consolide le vestibule et joue le rôle d’ouverture
symbolique entre espace public et espace privé.
Cette grande ouverture vers le
double escalier était pratiquée dans un mur de pierre et de brique dans lequel étaient
enrobées 4 poutrelles placées verticalement, indispensable à la stabilité du
bâtiment. Il eut été facile de les enrober totalement dans le mur, mais pour
Horta, ca aurait été une faute et il
décide de les laisser dans l’axe des murs (P 38) afin qu’elle puisse travailler dans les
meilleures conditions de résistance. De ce fait, elles devenaient partiellement
apparentes. Certains éléments montre comment, avec de l’imagination et une
certaine virtuosité, un élément constructif, d’aspect assez rébarbatif, peut
devenir une œuvre d’art. (P
39) comme le départ d’un élément métallique. On retrouve de nombreux
exemples de cette maitrise dans les constructions de Horta entre 1893 et 1906,
période la plus faste en invention et apogée de son architecture.
Le hall du grand escalier (P 40)
Il faisait suite au grand
vestibule. C’était un escalier utilisé pour monter, si l’on monte, on trouve le
hall avec le grand escalier qui mène au vestibule du 1er étage, à la
salle de réunion au 2eme et à la salle de spectacle au 3eme)
Ses murs longitudinaux se
trouvaient dans le prolongement de ceux du grand vestibule.
La pièce est simple, droite, a
l’inverse du vestibule de l’Hôtel van Eetvelde. Cet hôtel est commencé par
Hora au même moment que la Maison du Peuple, mais, son vestibule est beaucoup
plus compliqué : il nous oblige à suivre un escalier en tournis.
(P41)
Parallèles, sur la moitié de leur
développement, les murs convergeaient ensuite vers les dés (P 42). Chacune des
déviations était réalisée par un plan concave à peine perceptible et d’une
grande finesse de tracé. On découvrait le départ de l’escalier de fond,
véritable apothéose et moment unique dans l’histoire de l’art ; une volée
de 8marches flanquée de deux dés qui prenaient appuis sur la deuxième marche, 3
marches se profilant pour s’estomper et venir mourir sur un sous bassement. (P43)
Ces dés, ces piliers et ces
chapiteaux qui étaient le prolongement l’un de l’autre, était-ce de la
sculpture ou de l’architecture ? L’œuvre, dans sa simplicité apparente, échappe
à toute classification. Les 3 termes : dés, piliers, chapiteaux employés un
peu plus tôt perdent leur individualité tant la fusion des 3 éléments était totale. Il ne
s’agissait plus en réalité que d’un seul élément de composition (P 44).
Au centre du premier palier, une colonnette
en fonte, sur un soubassement en pierre bleue, marquait la division de
l’escalier unique en deux volets identiques de dimension plus réduite. Chacune
de celles-ci étaient traitées séparément en brique, pierre bleue et blanche,
fonte, poutrelles, tous les matériaux restant apparents.
(DIAPO 2 – 1ère étage)
On retrouve des magasins du côté de
la rue Stevens,
On a aussi la hauteur du plafond
du café puisqu’il s’étirait sur 2niveaux.
Enfin, on a des bureaux côté rue de
la Samaritaine
(DIAPO 3 – 2ème étage)
ð La salle Matteotti (P 45) (ou salle de
réunion du deuxième étage)
Cette salle (16 x 8,50 x 5)
située au second étage était initialement une salle de gymnastique, de réunion,
et de projection pour les jeunes. Sa caractéristique essentielle se trouvait
dans le plafond étagé sur 3 niveaux et correspondant a la sous structure du
plancher des 3 dernières travées de la grande salle de spectacle qui lui était
superposée. La plus grande fenêtre possible placée sur la largeur et du coté le
plus haut assurait a la salle un éclairage suffisant.
(DIAPO 4 - 3ème étage)
ð Salle destinée aux réunions du parti et aux fêtes
et spectacles (on y arrive par le grand escalier)
Cette salle (54x 16,50 x 10,50)
permettait d’accueillir 1500personnes assises.
Dans la charpente de cette salle
de spectacles, Horta développe une
construction extrêmement légère qui, malgré son raffinement, affiche clairement
la composition de sa structure. Il ne se contente pas de reprendre l’acier des
constructions industrielles et du monde des ingénieurs. Il donne à ses poutres
très ajourées, le pouvoir d’exprimer symboliquement les forces et les tensions
que subissent les matériaux. Anticipant les déformations et fléchissements (P 46) – une action
rendue possible par l’usage du fer et de l’acier -, il génère un équilibre
harmonieux agréable a la vue.
Le soleil afflue par les séries
de fenêtres du mur sud (P47)
Côté nord, la lumière est plus
douce, et on a accès à la tabagie, pour les entractes. P48)
Vu la situation élevée de cette
grande salle, les normes de stabilité imposaient une réalisation aussi légère
que possible.
Au fond de la salle, le plancher
se relève pour des raisons acoustiques car l’orateur devait être entendu de
tout le monde (P49)
La galerie supérieure est
accessible au public (P50).
Elle ceinture tout l’espace.
Pour soutenir tout ce poids, on a
disposé de très grosses poutres d’acier dans l’étage inférieur, ce qui n’a pas
toujours d’effet heureux, comme peut en témoigner la poutre qui traverse la bibliothèque
publique (P51)
III – Les réactions
engendrées par la Maison du Peuple ?
1) Une
critique favorable ou plutôt favorable
Un regard positif :
- Le « Peuple » n’hésite pas à l’appeler
« le monument ». Dans la même édition, le journal publie des dessins
des éléments les plus caractéristiques de l’édifice et
écrit : « toute lumière et toute force – aux quatre coins e
l’horizon, ouverte au soleil qui l’inonde, appuyée sur une musculature de fer
qui la dresse, indestructible […] La nouvelle maison du peuple de Bruxelles
apparaît face a la capitale qu’elle domine, comme a l’avenir qu’elle évoque. Du
haut de la terrasse, tous les monuments du bas de la ville semblent se presser
a ses pieds […] O transfiguration des choses ! La cathédrale et ses
succursales, c’est la religion qui vient a son tour payer son tribut de
soumission au socialisme triomphant, la vieille foi qui s’incline devant la foi
nouvelle ».
è Un regard plutôt positif :
- Le « journal de Bruxelles » se demande si la
maison du peuple vaut le gros million qu’elle a couté. Il trouve que
l’extérieur n’est pas beau, cependant – ajoute t-il – le souci d’art apparaît
dans certains contournements de boiseries et dans ceux surtout des balustrades
de fer des balcons de sauvetage, longeant l’édifice dans le haut.
Un regard partial qui s’attarde sur la
décoration :
- La « Gazette » écrivait l’autre jour aussi. « Au
dehors le caractère même du monument, l’économie de sa construction imposaient
une décoration sobre en fait, elle est toute dans les balustrades des balcons
de sauvetage, les boiseries des portes et des fenêtres. Ce n’est pas le moment
de discuter les formes décoratives de l’architecture de M. Horta. On connaît le
type caractéristique de sa colonne en métal qui, quelque soin qu’il prenne de
ne pas imiter, interpréter les formes naturelles, rappelle si évidemment une
tige végétale, s’accrochant par les griffes de ses courtes racines a la pierre
qui la supporte, épanouissant et entre croisant quelquefois les naissances de
ses rameaux pour recevoir la pierre supportée par elle. On connaît sa passion
pour les courbe, qu’il justifie, elle, au contraire par les exemples e la
nature, la ligne droite est rare, passion qui va jusqu'à imaginer des plafonds
cylindriques ou ellipsoïdaux, on sait la franchise avec laquelle il tire parti
de l’irrégularité et de l’asymétrie, et on connaît la jolie fantaisie de ses
ornementations qui, a y regarder de prés, rappellent beaucoup les galbes de
coquillages des ornementations Louis XV, ne sont a la vérité qu’un Louis XV
plus maigre, plus austère, un Louis XV calviniste. »
è Même le commanditaire est heureux du
résultat :
- La conseil d’administration de la coopérative
écrit : « Maintenant que la nouvelle maison du peuple est édifiée,
qu’elle fait l’admiration des Bruxellois et des étrangers, nous pouvons être
fiers de notre local et, avant tout, nous tenons à remercier et a félicité M
Horta, notre architecte, qui a si bien conçu les aspirations de la coopérative
socialiste et les besoins du Parti ouvrier Bruxellois et a mis a notre service
son talent d’architecte et d’artiste pour nous donner pleine et entière
satisfaction. »
2) Cependant, cette vision positive ne dure pas …
è Une vision assez négative a postériori de
l’œuvre de Horta :
- Le vieux notable socialiste Camille Huysmans dit que
« l’idée générale de Horta était de construire une grande salle aux
quatrième et cinquième étages, mais cette salle était mal conçue. Les auditeurs
du fond n’entendaient pas les orateurs assis sur la scène. Il n’y avait pas d’ascenseur.
Le public devait atteindre la salle à pied par un couloir montant, impossible à
monter par des citoyens d’un certain âge. A la veille de l’inauguration de son
prétendu chef d’œuvre, Horta s’est aperçu, gave a Huysmans, qu’il avait bâti en
l’air et qu’il n’y avait pas de soutien pour la parti droite de la
construction. Il a été obligé de la soutenir par un appareillage en fer,
portant du bas vers le haut. Cet appareillage existe toujours. En outre, les
salles étaient construire en dépit du bon sens. Elles étaient trop grandes ou
trop petites. Elle ne convenait pas au personnel médical, ni au personnel
politique. Au bout d’un certain temps, il a fallu compléter par le dos la
géniale architecture de Horta. On avait choisi comme architecte un technicien
qui ne semblait avoir aucune idée de ce que devait être un bâtiment destiné à
la foule. On avait fait appel a Horta pour la construction de la maison du
peuple parce que cet architecte avait des amis parmi les personnes ayant avancé
de l’argent pour la construction. Ces amis de Horta étaient aveugles – Dit
Huysmans - . Ils faisaient valoir que l’intéressé avait inventé un système
original, dans lequel le fer devait jouer un rôle nouveau. Cette adaptation du
fer était considéré comme exceptionnellement géniale. Je n’ai jamais partagé
cette idée. J’ai visité les autres constructions de Horta. Je n’y ai jamais
rien trouvé d’original ».
3) Même
Horta se rend compte du changement de regard vis-à-vis de son œuvre :
- Dans ses mémoires, il écrit sur la maison du peuple qui
a déjà été modifiée, agrandie sans sa participation ; elle a été repeinte
sans aucun respect des tons originaux. « Depuis lors, la maison du peuple
a été agrandie sans mon concours, de même elle a été peinte et repeinte sans
soucis de ce qu’elle était lors de l’inauguration. Elle n’a pas pu grandir
proportionnellement au parti. S’il fallait le refaire, il faudrait lui donner
un tout autre caractère, car elle plus en rapport avec les exigences d’un parti
dominant les autres. L’enseigne d’hier n’est plus l’enseigne d’aujourd’hui. Si
on la démolissait, je n’en serais guère étonné, elle subirait dans ce cas, le
même sort que plusieurs autres de mes œuvres qui ont déjà subi »
L’Edifice, s’interroge l’auteur, serait il a ce point dépourvu de grandeur, de
beauté architecturale pour qu’on se permette des transformations et même une
démolition ? »
- « Ma fidélité au programme donné, la préoccupation
de l’emplacement du terrain étaient autant d’obstacles se heurtant au thème
d’extension, car il était impossible de prévoir ans cette voie des ajoutes ne
sachant d’où elles viendraient, ni quelle serait leur importance. Il en était
de même pour mon architectonique, visant à être non un style, mais la simple
expression de mes gouts et de mes capacités dénuées de tout emprunt, tendant à
donner à l’œuvre un caractère permanent ; mais passager, a moins que par
l’énorme détour de la conversion des gouts artistiques et publics, l’œuvre
ayant résisté à la démolition, prenne caractère de permanence, et de
conservation définitive »
CONCLUSION :
- CEPENDANT,
la démolition va être décidée :
- A l’annonce de la démolition possible de la maison du
Peuple (P52), la
société centrale d’architecture de Belgique et la société Belge des Urbanistes
et Architectes modernistes lancent un manifeste de protestation qui recueille
environ 600 signatures d’architectes et de personnalité du monde des arts. Au
congre international des architectes à Venise en 1964, une motion, votée à
l’unanimité des 700 participants, adjure le gouvernement belge d’intervenir.
- Mais le 30 janvier 1964, le « soir »
titre : « La maison du peuple définitivement
condamnée » « l’annonce de cette disparition a plus ému les
étrangers que les belges, mis a part le courageux manifeste de la société
centrale d’architecture. En effet, l’œuvre du baron Horta n’est appréciée a sa
très valeur qu’en Amérique, qu’au Japon, que dans les pays nordiques ; en
Italie, en Allemagne, ou en en France parfois. En Belgique, le culte raisonné
et raisonnable du grand architecte du « modern style » est aussi
restreint que profond. »
- Des solutions pour sauvegarder la maison du peuple
avaient été proposées : Comme démonter en vue d’une reconstitution
intégrale ou partielle de la maison du peuple (la sale de spectacle, la salle
de café, la salle d Matteotti). Ou alors en faire un musée d’art moderne dont
Bruxelles est dépourvu mais la structure de l’édifice ne le permettait
pas ! Une somme dérisoire de 25millions de franc aurait suffit à la
sauver. (seuls quelques éléments ont été récupérés et remontés dans quelques
bâtiments mais de nombreuses parties ont : soit été vendues sur le marché
du fer ou abandonnées a la rouille dans des industries. (P53)
- En 1912, l’autorisation d’élever sur cet emplacement
une construction a six étages en béton armé avait été accordée et en 1964, les
six étages deviendront 20 et + ! Un immeuble-tour lourd remplace la petit
chef d’œuvre de Horta.
- Une construction
banale a supplanté un chef d’œuvre ; cette substitution retentissante a
aussi enlaidi la ville dont les rapports avec l’environnement avaient été
interprétés par Horta avec subtilité ; même dans la nouveauté. La ville
d’aujourd’hui se fait violence à elle-même et verse dans un gigantisme sans
qualité